26 mois pour une victoire

Aujourd’hui, nous avons fait la paix avec la vie. Une joie immense nous a envahi à l'annonce de la rémission de Stanislas.
Aujourd’hui, nous sortons d’une très longue épreuve.
Mais je ne pense pas que nous puissions vraiment fermer cette parenthèse.
D’abord, parce que tout est possible et qu’il faudra encore 5 ans avant que Stanislas ne soit déclaré guéri. Et que même après, tout sera possible, même l’apparition d’effets secondaires imprévus des années après le dernier traitement.
Ensuite parce que nous avons laissé, dans les recoins de l’hôpital, beaucoup de nous-même.
Nous avons perdu l’innocence et la foi dans l’avenir qui font qu’on rêve, qu’on fait des projets, des enfants…
Et puis, nous ne pourrons jamais oublier ceux que nous avons connus et qui ont été emportés par la maladie.
Je n’oublierai pas la maman de Oualid qui sortait de sa chambre en souriant et qui, hors de vue de son fils, se recroquevillait par terre et pleurait.
Je n’oublierai jamais l’étreinte désespérée avec Karine, la maman de Yanis, sortant d’un entretien où le médecin avait avoué son impuissance et son inquiétude alors que son fils gisait inconscient et brulant de fièvre dans son lit.
Je n’oublierai jamais la maman de Josselin avec ses yeux presque fous, ni Corentin que la radiothérapie faisait délirer de douleur.
Je n’oublierai pas Louis qui, victime d’effets secondaires terrifiants, disait à sa mère qu’il préférait mourir que souffrir ainsi.
Et Stanislas demandant « pourquoi on va à l’hôpital si ce n’est pas pour guérir ? »
Et cette jeune fille, presqu’au bout de ses jours, qui essayait d’apaiser sa maman en disant « tu sais, c’est formidable, l’hiver ne reviendra plus jamais pour moi ». Et de Julianne.
Une partie de moi errera toujours dans ce couloir, qui amène à une salle de réunion discrète. Etre invités, là-bas, c’est apprendre le pire ou le presque-pire. Et les parents en ressortent effondrés, terrorisés, désespérés. Et l’effroi, dans un grand frisson, se propage de chambre en chambre.

Paradoxalement, je crois aussi que nous avons beaucoup gagné au cours de ces 26 mois.
D’abord, nous avons trouvé en nous des réserves infinies de force, d’énergie, de dignité. Amaury dit que nous sommes des super-héros boiteux, je préfère dire que nous sommes de douloureux vainqueurs.
Ensuite, le prisme par lequel nous voyons nos vies a considérablement changé.
De personnes ultra organisées (cela vous fait sourire si je vous dis qu’en 2008, nous avions fait une prospective à 10 ans pour réfléchir à ce qu’on voulait faire de nos vies ?), nous sommes devenus des chantres de l’instant. Le présent nous suffit désormais.
Nous avons aussi appris que la seule richesse, c’est l’amour. Que l’argent, la réussite, les honneurs ne sont d’aucune utilité face à la maladie.
Nous avons beaucoup perdu d’amis ou de proches qui se sont éloignés, rebutés par la souffrance, mais nous avons aussi gagné des amitiés rares, des ententes immédiates, des connivences parfaites.
Et l’immense solidarité des personnes ayant souffert d’un cancer ( ou de leurs proches) pour ceux qui traversent cette épreuve. La plus belle facette de l’humanité.

Commentaires

  1. Je ne sais pas ce qu'il faut dire dans ce cas-là, mais c'est formidable pour vous.

    Ton billet m'a beaucoup ému.

    Continuez à profiter de la vie et de tous les instants quels qu'ils soient!

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  2. J'en ai les larmes aux yeux... de bonheur !
    J'embrasse fort fort Stanislas de ma lointaine Alsace !
    Bon vent à ce petit bonhomme !

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  3. je suis aussi très très émue, et vous redis mon affection et ma joie de savoir que vous vivez ce beau tournant !

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  4. Cette journée se termine par une bouffée de joie à cette nouvelle. Je l'espérais tant pour Lui, pour Vous. Et si rien n'est achevé, une page se tourne. Vous garderez au coeur toutes ces souffrances partagées, les petits moments de bonheur croisés. Vous ne sortez pas indemnes, mais terriblement grandis. Vivez l'instant présent, et que, comme vous, nous soyons capables d'en faire autant. Les jour s à venir auront certainement une saveur particulière.
    Brassées de tendresse à vous 4
    Mamiedo

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  5. Quel bonheur de lire ce billet, je partage de loin et avec humilité toute votre joie!!! Quel soulagement et quel parcours pour vous tous!

    Je n'avais pas encore osé réagir même si je suivais ce fil sur ton blog, trop d'émotions... le cancer est derrière moi depuis 9 ans, d'autres membres de ma famille proche n'y ont pas survécu mais c'est ainsi et la vie continue quoiqu'il arrive! Je profite de la vie à chaque instant, chaque jour, mais je n'oublie pas ,jamais...

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  6. J'ai une petite larme au coin de l'oeil. Je suis si heureuse pour vous et surtout pour lui. Bise amicale.

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  7. Je me souviens très bien de vos mots posés chez Marion qui m'ont mené chez vous. Je me souviens de l'échéancier, des mois qui s'écoulaient et de votre ventre qui semblait s'arrondir derrière l'écran. Je me souviens du carnet de route aux croquis si sombres, à cette espérance laissée à la porte, à ces 3 sur 4 qui me hantaient. Je me souviens de vos ligne à l'aube de 2012, pleines d'espoir et de promesses naissantes. Et puis ses prénoms, ces pensées, ces "hommages" qui déchirent les cœurs et auxquels je repense souvent...
    Alors aujourd'hui je souris comme je souris ! J'ai envie de crier ma joie et de la partager...Je suis tellement, tellement heureuse pour vous...

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  8. depuis longtemps je suis ton blog en "sous marin" admirative de tant de force de courage et de créativité, mais aujourd'hui je ne peux me taire. Les larmes coulent toutes seules à la lecture de ton billet,tant d'émotions, d'humilité, de respect et cette joie immense pour vous 4 du fond de ma Dordogne je t'avoue mon bonheur pour Stanislas et de fait pour vous tous. Ma journée a commencé par ce rayon de soleil.
    un peu hors sujet : bravo pour toutes les réalisations qu'elles soient en étoffe ou sur papier, je suis baba, j'ai adoré le concept du livre parapluie
    douces pensées et bises à Stanislas
    Colette

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  9. Je lis ici depuis plusieurs mois, laissant rarement une trace, mais ce post n'est pas de ce que l'on peut quitter sans réagir. Félicitations à vous tous de vous être tant battus, félicitations pour ce chemin parcouru - même si on ne sait jamais de quoi l'avenir sera fait - et profitez comme il se doit de cette nouvelle vie sans arrière pensée. Bravo au fiston courageux qui, je l'espère, retrouvera la légèreté qui n'aurait jamais dû le quitter...

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  10. A force de boire à la santé de Stanislas on va finir par devenir alcooliques ici !!!! bises

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  11. Je t'ai déjà écrit deux ou trois fois, il me semble, pour te dire mon soutien. Je suis heureuse pour vous 4, pour ton fils qui a l'âge du mien qui a traversé une sacrée épreuve toute comme sa famille.
    Comme tu le dis, je ne crois pas qu'on sorte de cette parenthèse, elle fait partie de notre vie, de nos espoirs et de nos peurs aussi. Mais on y gagne parce qu'on apprend, par la force des choses pour survivre aussi, à saisir chaque instant.
    Alors savoure ces moments! Et puis, aussi si toi ou ton mari dans les jours, mois qui viennent, n'êtes peut-être pas aussi "guilleret" que tout le monde l'attend, ne t'inquiète pas. Il faut du temps pour digérer tout cela. Avant, pendant de longs mois, vous avez vécu suspendu à un fil, en urgence presque.
    Je te dis cela en toute amitié. Non pas pour te gâcher le plaisir. Mais tu verras, qu'une fois les traitements terminés, les gens s'imaginent que c'est fini, qu'on passe à autre chose. Ils oublient peut-être parce que çà leur fait peur les examens réguliers pour voir si ca ou pas, si on peut respirer ou retenir sa respiration en se disant qu'on veut vivre encore tous ensemble à peu peu près normalement.

    Alors bon vent à toi, aux tiens. Tenez bon!! Bon projets à moyen et long terme:-))

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    1. Lula00, je t'aurai bien envoyé un mail pour continuer la discussion mais je n'arrive pas à récupérer ton adresse (quelle courge je suis!)Merci pour ton long message. Nous sommes sur la même longueur d'onde. Cette nouvelle est un bonheur mélangé de peur et de tristesse. Je t'embrasse

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  12. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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  13. Très touchée par ton message. Je suis très heureuse pour vous. Moi qui est perdu ma meilleure amie il y a bientôt 4 ans, emportée par une leucémie après 10 ans de combat ; j'avais du mal à croire aux bonnes nouvelles dans ce domaine. Le combat de Stanislas redonne de l'espoir pour tous les malades. Et même s'il y aura encore des contrôles, des examens, l'attente des 5 ans.... je vous souhaite une nouvelle vie sereine et à fond dans le présent. Plein de bises.

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  14. Je laissais rarement (jamais ?) de commentaire sur les posts touchants à la maladie de Stanislas, parce que je ne savais pas quoi dire, comment le dire, parce que les quelques mots qui me venaient à l'esprit avaient déjà été dits dans les commentaires précédents, parce que c'est le choix de la facilité aussi de ne rien dire dans ces cas...
    Là quand même, j'ai envie de vous dire bon vent, bonne route, avec enfin la possibilité de se tourner vers l'avenir, même si les questions et les inquiétudes vont encore rester quelques temps !
    Et bravo Stanislas, vaillant petit soldat, de t'être battu et d'avoir vaincu cette cochonnerie de maladie !!!

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  15. Quel beau billet... si émouvant que des larmes se sont fraillé un chemin sur mes joues...
    Malgré mes multiples balades inconito sur ces pages... aujourd'hui... l'émotion est telle que je ne peux continuer mon chemin sans saluer votre force... douleureuse certes mais quelle performance...
    Apolivia...

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  16. J'ai lu ton texte avec beaucoup d’émotion. Je n'oublierai jamais la discussion que nous avons eu dans ta cuisine il y a quelques mois où ta force et ton courage m'avait impressionnée même si, bien sûr, dans ces moments là on n'a pas d'autre choix que d'avancer et se battre ! Tu me disais que vous espériez cette annonce de rémission, je suis heureuse que cet heureux dénouement arrive enfin. Bon courage pour la suite car j'imagine qu'il n'est effectivement pas simple de tourner la page et que l'angoisse doit rester au creux du ventre encore longtemps avant de réussir à la faire taire petit à petit. Je vous souhaite qu'à présent la vie soit douce, je vous souhaite plein de petits et grands bonheurs à 4 et je fais un câlin tout spécial à Stanislas :)
    Affectueusement
    Frédérique

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